MILLÉSIME 2020: quelques questions posées à notre vigneron, Matthieu Danglas, à chaud.
1/ Tout d’abord, est-ce que vous avez terminé les vendanges ? Est-ce que tout est enfin à l’abri ?
Le millésime 2020 s’annonce légèrement décalé cette année. Nous avons commencé les vendanges le 14 août, inhabituellement tôt en ce qui nous concerne. Certes nous avons commencé avec deux cépages précoces pour notre région méridionale, Gewurztraminer et Pinot noir. Mais d’habitude nous ne commençons pas avant fin août. Nous avons terminé les vendanges avec nos mourvèdres le vendredi 2 octobre, poussés par la vague de froid de ce début d’automne. Au final, les vendanges se sont étalées sur 7 semaines. En 2019, elles avaient duré 6 semaines. Alors qu’en 2018 elles n’avaient duré que 5 semaines.
2/ Premier verdict à chaud : tu en penses quoi de ce millésime 2020 ? Comment s’est déroulée l’année et comment trouves-tu le résultat (quantité et qualité) ?
On savait que cette année était compliquée, à tous points de vue. D’abord à cause de la pression sanitaire énorme cette année. Au mois de mars et avril, nous avons reçu pas mal de précipitations. Bien sûr, c’est une bonne chose, cela permet à la vigne de se développer sans pression, surtout pendant la période de la floraison. Mais c’est également porteur de maladie. Les plus pluies régulières ont compliqué la protection des vignes face notamment au mildiou. Puis l’année est devenue plus compliquée avec divers épisodes de grêles alentours, sans qu’on se trouve réellement touchés. Par contre, les vignes ont légèrement moins souffert de la sécheresse que les autres années. On a notamment évité les grosses chaleurs nocturnes cette année.
Au niveau des maturités, les vignes ont bénéficié d’un environnement plus favorables cette année, avec notamment ce stress hydrique moins étouffant. On a rapidement constaté des maturités plus équilibrées (pour en savoir plus sur la détermination de la maturité des raisins, consultez cet article). Mais tous les cépages n’ont pas été affectés de la même manière. Deux semaines d’avance pour le pinot, le gewurz, le merlot. Les grenaches ont muri très vite également. On a fini de récolter nos grenaches avant nos syrahs cette année, c’est incroyable. Par contre, les syrahs ont suivi la même évolution que les autres années et les mourvèdres ont eu du mal à mûrir.
Au final, c’est un millésime assez surprenant. La qualité des jus est très bonne, mais notablement différente: plus de fraicheur, plus d’équilibre, moins de tannins et de lourdeur.
3/ Qu’est ce qui est le plus complexe pour toi pour ce millésime 2020 ? La partie « vendange » ou la partie « vinification » ?
La partie vendanges, toujours. Mais cette année, c’était vraiment des vendanges sur le qui-vive. Quand on entend que des vignerons du Roussillon ont commencé leurs vendanges le 5 août, on se prépare bien plus tôt que d’habitude. Et puis on n’est toujours dépendant des divers épisodes climatiques qui peuvent faire basculer un millésime du tout au rien en quelques heures. Plusieurs épisodes cévenols nous ont fortement inquiétés, avec des précipitations intenses annoncées. Finalement nous avons été peu affectés et la météo était même clémente pendant les vendanges.
4/ Pour expliquer à nos lecteurs : quelles sont les prochaines étapes pour toi en terme de vinification ? Qu’est-ce qui va occuper tes jours à venir en cave ?
En cave, la plupart des fermentations se terminent. On travaille encore délicatement les cuves pour lesquelles la fermentation n’est pas encore achevée (c’est-à-dire que tous les sucres n’ont pas encore été transformés en alcool). Mais surtout on attend désormais la fin des malo (‘fermentations malolactiques’), sur les rouges uniquement. Et il faut rester vigilant car l’automne arrive et les températures commencent à baisser. C’est plus pratique quand les fermentations se terminent avant qu’il ne fasse froid en cave et que les levures s’endorment. Dans le cas contraire, on n’est obligé de réchauffer les cuves, afin de garder le milieu favorable au travail des levures.
Une fois que les malo seront achevées, on pourra passer à l’étape des assemblages. On a déja fait des premiers essais sur les blancs et les rosés au cours du mois d’octobre, bien plus tôt que d’habitude. Je suis très content de notre Minervois blanc. Il est dans la droite lignée des millésimes précédents, aromatique et équilibré, sans lourdeur. Depuis quelques années on reçoit de belles récompenses sur la cuvée Velvet blanc. Je pense que nos clients vont s’y retrouver complètement. En ce qui concerne le rosé 2020, c’est une vraie bombe, avec une couleur qui correspond parfaitement aux attentes de nos marchés. Pour les rouges, il est encore tôt pour s’essayer aux assemblages. On fera bientôt quelques tests pour le Ohlala 2020.
5/ Par rapport à ta gamme, quand allons nous pouvoir gouter tes premières bouteilles de ce millésime 2020 ?
Dès début décembre pour le blanc et le rosé 2020.
Pour les rouges, nous ne sommes pas pressés, certainement pas avant l’année prochaine. On préfère les laisser évoluer tranquillement. Mais il n’est pas impossible qu’on présente une nouvelle cuvée cette année. Alors j’aimerais qu’elle soit prête pour le mois de mars.
6/ Pour revenir à la vigne, maintenant que vous avez terminé les vendanges, quel va être ton travail sur les parcelles ? Que va-t-il se passer d’ici le début de la taille ?
On se prépare progressivement au passage du domaine en bio. On s’efforce d’améliorer le travail de nos sols, afin de les dynamiser au mieux. Par exemple, on essaie de labourer les parcelles rapidement après les vendanges, pour permettre aux sols d’absorber l’eau des pluies d’automne, et de se ressourcer naturellement. Après ça, on n’intervient plus sur le sol jusqu’au printemps. En ce qui concerne la taille, elle débutera au mois de décembre-janvier.
Pour en savoir plus sur le millésime 2020 dans l’ensemble, consultez l’avis des oenologues de France dans cet article de Vitisphère